Elles battent le trottoir depuis des décennies, nos chères Sœurs de la Perpétuelle Indulgence. Elles accompagnent nos nuits de messages de prévention, toujours utiles. Et le jour, ces filles de joie et de bonne humeur ont le don de s’associer aux artistes mili-tant-es qui propagent des valeurs qui leur sont propres : Jean-Luc Verna et Marc Martin.
Ce 17 mai, journée contre l’homophobie et la transphobie, les Soeurs de la Perpétuelle Indulgence étaient par monts et par vaux. A Paris, dans les jardins du port de l’Arsenal pour inaugurer ce monument conçu par Jean-Luc Verna, en collaboration avec l’association Les Oublié·es de la Mémoire. Autour d’elles, Anne Hidalgo et Jean-Luc Roméro étaient venus rendre hommage aux victimes homosexuelles de la déportation et à toutes les personnes LGBTQIA+ persécutées. Elles l’ont donc baptisé avec des bulles au vent : magnifique !
Ce même jour, un croustillant portrait de Pandora du Couvent de Paris était publié dans le quotidien Libération, pour couvrir l’exposition « Mauvaises Vies ? » du photographe Marc Martin. En effet, Sœur Pandora du Saut de l’Ange Dévote de Sarah Bernhardt fait partie de ces portraits de vie chaotique exposés à LaVallée-Bruxelles jusqu’au 23 mai. Nous l’avons rencontrée.
Bonjour Pandora. Les plus fidèles te surnomment Pan-Pan, Gardienne de la Fessée Céleste. Quand es-tu entrée au Couvent de Paris et pour quelles raisons ?
Dès 1991 j’ai croisé les Sœurs et les ai tout de suite aimées. Elles tombaient à pic. Ma vocation est tardive comme les vendanges du même nom qui donnent un vin doux apprécié par les vieilles tantes après la messe… Et c’est en 2007 que j’ai voulu entrer au Couvent de Paris pour garder et partager la joie, rester vigilante, insolente et pleine de sollicitude mais aussi pour montrer mes jambes car elles le méritent…
On oublie parfois le message de tolérance et de bienveillance que promulguent les Sœurs de la Perpétuelle Indulgence à travers le monde. Peux-tu nous raconter cette historique épopée ?
Au commencement Dieu créa le Ciel et la Terre. Au premier jour, il créa la lumière, puis le ciel, une nature luxuriante, des bestioles partout. Et puis le 6e jour, il créa les êtres humains pour s'aimer. Mais dès le 7e jour, ceux-ci s'entretuèrent et commencèrent à saccager leur si belle Terre ! Voyant ce bordel sans nom, il créa la Perpétuelle Indulgence le 8e jour… Mais cette partie de l'Hystoire reste bien souvent ignorée ! Plus sérieusement : les Sœurs de la Perpétuelle Indulgence sont nées à San Francisco en 1979. Un jour de Samedi Saint à Pâques, quatre amis ont revêtu des authentiques robes de nonnes. Armé·e·s de mitraillettes en plastique rose, ils·elles déboulent dans Castro, la Mecque gay et lesbienne de San Francisco. Ô stupeur, les garçons et les filles affluent vers ces personnages hauts en couleurs et en cris et commencent à se confier à celles qui devinrent nos Fondeuses !
Ton look fait à la fois référence aux bonnes sœurs d'une autre époque (on pense à Louis De Funès) et s'inscrit dans le présent par des messages arc-en-ciel et préventifs. Comment décrire ton look et vos actions à la fois provocatrices et sympathiques/sympathisantes ?
Les Sœurs, dans l’inconscient collectif, sont bonnes (enfin presque toutes). Quand tu croises une SPI, tu as la banane direct (je parle du sourire qui illumine ton visage). Nos habits sont chatoyants et colorés mais être Sœur de la Perpétuelle Indulgence ne signifie pas seulement porter des robes et des paillettes perchées sur des talons aiguilles à moitié pétés. Être Sœur, c'est avant tout promulguer nos Vœux et se mettre au service de nos communautés. Si nos actions et coups de cornettes riment souvent avec paillettes, nous expions la honte et la culpabilité stigmatisante : « allez dans la paix et péchez dans la joie ! » La messe est dite. Radicales, provocatrices, mais toujours indulgentes !
Tu es actuellement à l’affiche d’une grande exposition de Marc Martin à Bruxelles qui ouvre la saison des Prides en Europe. Quelle est ta relation avec le photographe ? Pourquoi a-t-il choisi Pandora au sein du Couvent pour défendre ses "Mauvaises Vies" à Bruxelles ?
J’ai été très touchée de la proposition de Marc Martin de participer à « Mauvaises Vies », cette exposition mili-tante. Il m’a sûrement choisie car je suis une fille de Joie - omniverselle, évidemment - pour la promulguer partout !
Mathis Chevalier, l’un des modèles fétiches de Marc Martin, a prêté main forte à la prise de vue. Les photos (notamment celle publiée dans Libé ce week-end) sont magnifiques. Les vidéos sur les réseaux sont devenues virales. Notre coup de cœur pour celle avec Monsieur le Curé. Raconte-nous.
Il y a eu une véritable connexion entre nous ! (Mathis, moi et l'objectif de Marc) Presque un miracle !
As-tu déjà rencontré des véritables Sœurs dans vos actions de rue ? Si oui, quelles ont été leurs réactions ? Et la réaction des croyants en général ?
Mais nous sommes de véritables sœurs, pas en toc, ni virtuelles ! Oui, cela peut arriver que nous croisions des sœurs d’autres ordres et lorsque nous échangeons, nous nous rendons compte que finalement nous avons les mêmes crédos notamment aimer sa/son prochain.e en la/le respectant. Ce que nous dénonçons ce sont les dogmes intolérants des religions, pas les croyant.es.
Quel est ton meilleur souvenir en tant que Sœur ?
Tous vos regards, vos sourires qui nous remplissent d’amour parce que nous l’avalons bien !
Quelle est ta devise aujourd'hui ?
Je sœur à rien mais suis bonne à tout !
Des projets au Couvent à l'approche du mois de la Pride à Paris ?
Nous sommes très sollicitées pendant ce mois, nous tâchons de répondre le mieux possible aux invitations, nous serons notamment présentes aux Solidays avec des sœurs venues d‘autres Couvents de France. Et nous marcherons dans différentes villes. Fières et radicales, belles et merveilleuses car il ne faut jamais rien lâcher !
Un dernier mot pour les lecteurs de Strobo ?
Les sœurs vous aiment ! Nous venons juste de lancer les bourses des Vents d’Anges : Les sœurs vident (à nouveau) leurs bourses : 5000€ à partager
https://www.lessoeurs.org/bourses-2025
Et pour remplir nos futures bourses, après avoir tant tapiné sur les trottoirs, nous sommes enfin reconnues d’utilité publique !