Faut-il s’en étonner ? La new romance lesbienne gagne en qualité et arrive dans les librairies. Ce genre, codé et romanesque, réjouit les fans et attire un nouveau lectorat dégenré, ravi de lire de belles histoires qui ne finissent pas en meurtre sanguinolent. Marguerite Grimaud, autrice à succès, témoigne, entre deux séries de dédicaces.
Oui, elles aiment ça et elles disent haut et fort. Quand Marguerite Grimaud, pétulante autrice, se rend à une séance de dédicaces, elle fait face à des lectrices qui la congratulent avec chaleur, pour sa capacité à raconter de belles histoires, avec une qualité de plume déployée dans quatre (gros) ouvrages publiés. On vous voit venir, petits snobinards : un roman sentimental lesbien, est-ce que ça manquait ? Eh bien oui, franchement. Car il fait montre d’ un art consommé de la narration. La progression des sentiments, l’acmé du désir ou la peur de n’être pas aimé.e, tout est là. Comme face à une bonne comédie romantique, on se laisse emporter, c’est délicieux. Reines de cœur, la maison d’édition qui fête ses 10 ans, voulait « proposer des romances saphiques et des romans fantastiques, policiers, fantasy et de science-fiction ». Le succès est là, validé par les librairies LGBT, avec 89 romans publiés : 71 romans écrits par des autrices francophones et 18 oeuvres traduites. Le best-seller ? 6h22 Place 108, signée Clémence Albérie.
Saphique et lesbien
Marguerite Grimaud emploie les deux mots pour parler de ses romans. Comme beaucoup, elle a longtemps lu de la new romance en anglais et se réjouit aujourd’hui du choix proposé. Dites-lui que son dernier roman, La constellation des sentiments, met en scène des bourgeoises au top de leur carrière, ça ne l’ennuie pas : « j’assume le fait d’écrire à propos de femmes qui ont pu conjuguer réussite familiale, personnelle et sociale malgré les obstacles. Pour les franchir, elles ont dû se surpasser et n’en sont devenues que plus fortes ». Ses héroïnes s’affichent gourmande de grands et petits plaisirs, avec un sens du détail qui fait mouche. Sans oublier l’art du faux suspens : « dans la romance, on sait que les deux héroïnes vont tomber amoureuses et partir dans le soleil couchant main dans la main. La question, c’est de savoir comment ça va arriver. Et ça, ça prend environ 300 pages, même s’il faut du drama pour que l’amour triomphe à la fin. Pour se reconstruire après un drama ou un trauma, il faut avoir un appétit de vie inouï ». Sans oublier de jouir, « il y a des baisers, du sexe, de l’amour. Mes romances sont aussi des actes militants : visibilité des lesbiennes et de leurs désirs, empowerment, réappropriation des corps… » Les salons du livre et les librairies qui s’arrachent Marguerite l’ont bien compris. Dans le petit village où elle vit, on l’a aussi invitée à dédicacer. Comme d’autres autrices de cette nouvelle vague, elle prouve que la romance peut faire de l’excellente littérature et séduire par son universalité.
La constellation des sentiments, Marguerite Grimaud, Editions Reines de cœur, 20,90 euros
