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  • Le 22 novembre, le Sénat a voté une proposition de loi du sénateur socialiste Hussein Bourgi visant à reconnaître la responsabilité de la France dans la condamnation d’hommes gays au XXème siècle. Hélas, le texte a  été au passage vidé d’une grande partie de sa substance. Explications avec le sénateur de l’Hérault.

    C’est très loin d’être une victoire, mais c’est un premier pas. Le Sénat a adopté à l'unanimité le 22 novembre une proposition de loi du sénateur de l’Hérault Hussein Bourgi qui vise à reconnaître le préjudice subi par les hommes condamnés « pour homosexualité » entre 1945 et 1982, date à laquelle la dernière disposition a été abrogée.

    Selon l’historien Régis Schlagdenhauffen, 10 000 hommes auraient été condamnés en vertu des trois lois citées par le texte présenté au Sénat : le troisième alinéa de l’article 331 abrogé le 23 décembre 1980 relative à la répression du viol et de certains attentats aux mœurs, le deuxième alinéa de l’article 331 du code pénal abrogé le 4 août 1982 et le deuxième alinéa de l’article 330 du code pénal abrogé le  23 décembre 1980. Si la loi était votée en l’état, seule une poignée des hommes ayant été condamnés pourrait remplir aujourd’hui un dossier et demander à être indemnisés. Beaucoup sont en effet morts. 

    Mais, avant d’être votée, la proposition de loi a été vidée d’une grande partie de sa substance. La droite, majoritaire au Sénat, avait désigné comme rapporteur de la loi le député LR Francis Szpiner. Suivant ses préconisations, la majorité sénatoriale a refusé de voter les articles qui prévoyaient une indemnisation (10 000 € + 150 € par jour de prison). Elle a également refusé la création d’un délit de contestation de la déportation de personnes en raison de leur homosexualité depuis la France. Et enfin elle a restreint la période à 1945-1982, considérant que la République Française ne peut être comptable des actions du régime collaborationniste de Vichy. 

    Genèse de la proposition de loi

    Contacté par téléphone, le sénateur Hussein Bourgi, ancien militant associatif LGBT de Montpellier, revient sur l’histoire de sa proposition de loi et sur ce qu’il attend de la suite. La genèse du texte de loi remonte à 2002. A l’époque, Hussein Bourgi organise un colloque à Montpellier sur les 20 ans de la dépénalisation, avec le parlementaire Jean-Pierre Michel, l’un des pères du pacs, le journaliste et militant Jean Le Bitoux, et les militants Gérard Bach-Ignasse et Michel Chomarat. A la fin des interventions, il remarque qu’un nombre inhabituel de mains se lèvent dans le public. « Souvent, lorsqu'on fait un débat ou une conférence, lorsqu'on fait circuler le micro et qu'on donne la parole, les gens sont toujours très hésitants à intervenir. Et là, il y a eu beaucoup, beaucoup d'interventions de gens d'un âge avancé, qui oint témoigné de cette réalité-là en disant « Moi aussi, j'ai été inquiété, moi aussi, j'ai été condamné, moi aussi, j'ai été poursuivi. » Et du coup, ça a permis à l'auditoire présent de se rendre compte qu'en réalité, ce n'était pas uniquement une affaire isolée avec Michel Chomarat, qui était au mauvais endroit au mauvais moment ce jour-là. »

    Le deuxième déclencheur c’est une série d’articles dans Le Monde consacrée aux personnes qui ont été condamnées par ces lois, notamment Bernard Bousset, ancien président du Sneg. « Après, il y a d'autres journalistes qui ont embrayé sur cet article, et qui ont publié beaucoup d'articles, et ils ont dit qu'on rencontre des difficultés à trouver des gens parce qu'ils sont tous morts ou très âgés. Et donc, là, je me suis dit qu’il fallait absolument faire quelque chose. »

    Pour rédiger sa proposition de loi, il s'inspire à la fois de lois similaires à l’étranger et d’une loi française qui vis à vis des harkis, votée en 2022. Et selon lui, rien n’aurait pas arriver sans ceux qui ont témoigné (et les journalistes qui ont recueilli leur témoignage), mais aussi les universitaires, qui ont permis de chiffrer le préjudice et de montrer qu’il ne s’agissait pas de quelques cas isolés. 

    Les associations LGBT taclées

    En revanche, il s’étonne du manque de soutien associatif : « j'ai été assez surpris, assez meurtri et très déçu par les associations LGBT. J'ai constaté que les associations LGBT, l’histoire dont on parle n'était pas une priorité pour elles. Elles ne l'ont jamais portée, elles ne l'ont jamais revendiquée. Et je n'ai objectivement relevé aucune manifestation de revendication de cet acte récemment. Et lorsque je dépose la proposition de loi, aucune association, ou très peu d'associations, n'a répondu. Deux ou trois ont fait part de leur soutien à l'initiative ou ont réagi en en disant du bien. Et même celles qui en disent du bien, il y en a à peine une ou deux qui ont écrit à leur parlementaire. Donc ça m'interpelle aujourd'hui. Et pour moi, ça reste l'énigme dans cette histoire. »

    Lorsqu’on l’interroge sur les détricotages de son texte, il répond point par point. Sur la restriction à la période 1945-1982 au lieu de 1942-1982, il a trois arguments. Premièrement au lendemain de la guerre, le gouvernement d’union nationale a choisi de maintenir les lois d’exception vichystes concernant l’homosexualité, alors que toutes les autres ont été abrogées. Ensuite, le Général de Gaulle lui-même a estimé à l’époque que « la République n’avait jamais cessé » (pendant Vichy). Enfin, dans son discours du Vel d’Hiv en 1995, Jacques Chirac a reconnu que la France était comptable des années collaborationnistes. Mais c’est un vieux débat qui déchire la droite depuis toujours et le débat ne semble visiblement pas terminé.  

    Sur le refus de la réparation, « certains ont dit que ce serait un appel d'air, qu’on ne l'a jamais fait en France que si jamais on commence à le faire pour les homosexuels, pourquoi pas demain d'autres catégories de personnes qui ont été victimes par le passé, etc. Moi, pour moi, le débat, il est clos. Parce qu'on l'a fait pour les harkis. Donc ils ne peuvent pas dire qu'on ne l'a jamais fait en France. »

    Enfin sur le refus de créer un délit de contestation de la déportation homosexuelle, au motif que les lois actuelles suffisent, Hussein Bourgi rappelle qu’en 2012, Christian Vanneste a été relaxé par la Justice pour des propos dans lesquels il qualifiait de « légende » la déportations des homosexuels en France. Eric Zemmour est actuellement poursuivi pour les mêmes raisons. Il ne sait pas si le polémiste d’extrême-droite sera aussi blanchi par la justice, mais « si jamais on avait voté cette disposition-là, elle aurait permis au mieux de bétonner l'arsenal pénal français pour les prochaines années, si jamais cela venait à se reproduire. »

    Optimisme pour la suite

    Sur la suite de sa proposition de loi, Hussein Bourgi se veut relativement optimiste : « je considère qu'aujourd'hui, il y aura une majorité à l'Assemblée nationale pour intégrer la réparation. Parce que j'ai eu des contacts avec des députés de plusieurs bords. Et j'ai vu aussi les déclarations de certains députés au lendemain du vote de cette proposition de loi. Et donc, je considère que les conditions peuvent être réunies et doivent être réunies à l'Assemblée nationale pour réintégrer la réparation. »

    Le sénateur rêve d’un vote à l’Assemblée Nationale avant la fin du premier semestre 2024. Et il aimerait que le gouvernement — qui contrôle 90% de l’ordre du jour du Parlement — en soit à l’initiative. Mais il n’a aucune garantie que cela arrive. Alors il va s’employer dans les prochaines semaines à faire pression auprès du cabinet de la Première ministre pour que le gouvernement s’empare du sujet. Il lance au passage un appel au soutien en direction des associations : « je leur lance un appel : faites ce travail de pédagogie, écrivez des courriers, prenez rendez-vous avec vos députés, allez les voir, sensibilisez-les, et si vous ne connaissez pas les tenants et les aboutissants et les jeunesses de la proposition de loi, ou de cette histoire, moi je suis à votre disposition. Mais vous ne pouvez pas rester en retrait, parce que c'est votre histoire. »

    Xavier Héraud
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  • On ne s’étonne presque plus du niveau de haine que Vladimir Poutine et ses sbires du Kremlin peuvent montrer à l’attention des personnes LGBTQIAP+. De longue date, les dirigeants russes ont voulu faire disparaître toute la communauté. Sur son propre territoire, les lois sont faites pour cadenasser les moindres faits et gestes des lesbiennes, bis, gays, trans. Interdisant par voie juridique tous faits et gestes. Cela ressemble une fois de plus à une oppression sans vergogne qui a des relents d’épuration pure et simple. Le dernier état de fait remonte au 30 novembre où la Cour suprême de Russie a banni pour « extrémisme » le « mouvement international LGBT et ses filiales », ouvrant la voie à des poursuites judiciaires et des peines de prison contre les homosexuels et militants défendant leurs droits en Russie. Jusqu’à présent ils ne risquaient que des amendes pour « propagande ». Pour faire suite à cette interdiction les forces de l’ordre font des descentes dans les lieux où se rassemble une clientèle homosexuelle. Ce qui fut le cas le 2 décembre, où de manière simultanée, la police a pris pour cible plusieurs boîtes de nuit et sauna à la clientèle homosexuelle. Ces répressions risquent de prendre plus d’ampleur avec le temps.

    Julien Claudé-Pénégry
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  • Le magazine masculin a distingué en autres l’humoriste et écrivain, notamment grâce à son premier livre, La prochaine fois que tu mordras la poussière, vibrant témoignage sur la découverte de sa sexualité et de ses préférences. Un deuxième ouvrage est en cours d’écriture. Il partage cette distinction avec d’autres artistes, comme le comédien François Civil.

    Bruno De
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  • Les livres sur le drag se multiplient. Drag, un art qui bouscule le monde frappe déjà par son format. C’est incontestablement un bel objet : la photo de la drag américaine The Vixen qui figure en couv sera du plus bel effet dans votre bibliothèque ou sur la table basse de votre salon. A l’intérieur, on retrouve aussi de belles photos évidemment, et côté texte, on alterne entre histoire du drag, des travestis de la Grèce Antique à RuPaul’s Drag Race, et interviews de drag-queens, drag-kings, club kids, et autres créatures. Il est difficile de résumer un art aussi protéiforme que le drag dans un seul livre, mais Apolline Bazin réussit à en montrer une belle diversité. Si vous avez un.e ami.e fan de drag et que vous ne savez pas quoi lui offrir à noël, ne cherchez plus ! 

    Drag : un art queer qui agite le monde, de Apolline Bazin, 45€. 224 pages

    Xavier Héraud
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  • Nous apprenons par voie de communiqué de presse que les associations Forum Gay & Lesbien et Body Design Lyon ont été radiées le 8 novembre dernier du Centre LGBTI par les instances dirigeantes du Centre. Pour mémoire, le Forum Gay et Lesbien est l’une des associations à l’origine de la création du centre. Dans leur communiqué, les deux associations radiées et expulsées du centre dénoncent une « dérive idéologique, sectaire et extrémiste des dirigeants actuels du centre » et demandent « l’asile politique » aux mairies d’arrondissement. Nous allons enquêter pour vous proposer un état des lieux dans un prochain numéro de Strobo mag.

    Franck Desbordes
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  • Le Stade Rennais a écopé de 70 000€ d’amende, des supporters ayant entonné des chants homophobes et utilisé des engins fumigènes lors d’une rencontre avec le FC Nantes en octobre dernier. Quant au PSG, il a été sanctionné par la fermeture de la tribune Auteuil du Parc des Princes pour un match pour des chants homophobes entendus lors d’un match contre l’OM.

    Bruno De
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  • Fluid : lesbienne

    Les réseaux sociaux sont leurs terrains de jeux favoris. Iels sont funs, engagé.e.s, tendances et font bouger les lignes.

     

    Les.sapphos

    Lou Dvina et Leontin Lacombe sont les deux facettes d’un couple lesbien connu sous le nom Les Sapphos ? Artistes et autrices, elles sont expertes en culture LGBTQI+ et se mettent en scène sur les réseaux sociaux pour aborder les sujets les plus courants de la communauté, proposer des bons plans, prodiguer des conseils et…parler « cul ». Elles créent des évènements, évoquent la prévention, ont écrit un livre intitulé Le Kamasutra Queer – Sapphosutra, Manifeste érotique saphique. Entre catalogue de positions à réaliser avec sa.on partenaire et anthologie poétique saphique, le Kamasutra queer comble un manque criant de représentation des sexualités lesbiennes dans nos imaginaires. Les autrices rendent hommage à un passé oublié, l’inscrivant dans la modernité au fil des pages où les positions illustrées par Lou Dvina accompagnent les textes poétiques recueillis par Leontin Lacombe. Objectif qu’elles poursuivent sur leurs pages officielles.

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    Gouinement lundi

    Tous les 4e lundis du mois, sur Fréquence Paris Plurielle 106.3 FM (www.rfpp.net) retrouver l’émission la plus gouine de France pour « les sans voix ». Sinon vous avez la version podcast sur toutes les plateformes, disponible tous les jours de la semaine. Gouinement lundi vous entraîne dans un univers qui parle ouvertement de tout ce qui a trait aux femmes qui aiment les femmes. Leur page instagram est l’écho visuel de leur engagement sonore, celui d’offrir un espace safe, une zone de liberté d’expression, de revendications, d’entraide, de mise en lumière, d’accueil et de diversité. Les femmes ont la parole et la prennent. Influenceuses, artistes, performeuses, associations, autrices, politiques, entrepreneuses, elles passent au crible ce qui fait bouger la planète lesbienne. Des marches, PMA, confidences, violences, immigration, sexualité, transitude, lesbianisme à Club Gouine, le segment musical de Gouinement lundi. Un moment que l’on attend avec impatience. Bravo les gouines !!

    Insta @Gouinementlundi : 9444 followers

     

     

     

     

    The.lesbianist

    "With lesbians. For lesbians. By a lesbian", voilà le postulat de départ qu’affiche fièrement Mylène Comte pour présenter son travail sur ces réseaux sociaux. Cette photographe a toujours été attirée par l’image et sa représentation dès son plus jeune âge. A côté de son travail créatif institutionnelle pour de grandes marques telles que LVMH, Krug, Shisheïdo, Têtu, elle nourrit une œuvre artistique autour des cultures lesbiennes en capturant « leurs visages, leurs amours, leurs désirs, leurs luttes », explique-t-elle. Celle qui s’est essayée à l’argentique et au journalisme pose un regard, décrypte, représente les libertés saphiques sous tous les angles. Des fêtes au quotidien, de l’intimité au collectif, des fêtes aux manifestations, The.Lesbianist est une fenêtre ouverte sur un monde trop peu ou pas assez visible. Elle fige ces amours et leurs codes avec élégance, subtilité et militantisme pour relater « leur Histoire commune mais aussi leurs histoires singulières ».

    Insta@the.lesbianist : 7050 followers

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  • Puisqu’il faut théoriser le genre, du moins montrer la créativité hexagonale foisonnante, ce beau livre raconte leur histoire de Louis XIV à nos jours. C’est Nicky Doll, la grande prêtresse du drag français en profite pour dépeindre aussi le portrait de 16 queens et un king, aux univers aussi différents que variés. Cet ouvrage est le premier à se consacrer à la spécificité hexagonale en termes de Drag. Un exaltant voyage dans un monde pétillant et militant. 

    Reines : l’art du drag à la française, de Nicky Doll, Editions Hors Collection, 29,90€, 224 pages

    Bruno De
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  • Une campagne de haine sur les réseaux sociaux à l’initiative de la droite religieuse, mais aussi la forte hausse des violences physiques met en danger les personnes trans et non-binaires. En 2018, le Pakistan avait adopté une loi progressiste accordant aux personnes trans le droit de déterminer elles-mêmes leur sexe sur les documents officiels et même d’opter pour un mélange des deux. Depuis, dans ce pays musulman conservateur, la communauté queer dans son ensemble se bat pour faire évoluer les mentalités, notamment grâce à de nombreux contenus sur X, TikTok et Instagram.

    Bruno De
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  • Le 21 septembre, le site de voyage révélait les résultats d’une enquête sur les expériences de voyage des membres de la communauté LGBTQIA+. Les constats sont édifiants tant sur le sentiment de sécurité que la confiance de voyager vers des lieux qui soutiennent la communauté. Il en ressort que pour 76% des voyageurs et voyageuses français membres de la communauté LGBTQIA+, la sécurité et le bien-être individuels sont des facteurs à prendre en compte lors du choix d’une destination, un chiffre en hausse depuis 2022 soit un critère qui a augmenté de 10 points dans les préoccupations majeures. En France 45% des personnes interrogées ont indiqué que certaines destinations leur sont totalement inaccessibles car à ce jour, les relations homosexuelles sont encore interdites dans 64 pays à travers le monde, dont 11 dans lesquels l’homosexualité est passible de la peine de mort. Et fait encore plus préoccupant, 50% des Français interrogés ont été victimes de discrimination en voyageant. Des discriminations variées qui portent sur des stéréotypes, des moqueries et insultes, des intimidations par les autorités locales ou la population. 

    Julien Claudé-Pénégry
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